Nous vous proposons une présentation des textes liturgiques propres à ce dimanche (rite catholique traditionnel), avec leur commentaire.
Note : en certains lieux, ce dimanche, Solennité de la fête du Sacré-Coeur
« Toute la messe d’aujourd’hui chante la miséricorde divine à l’égard des hommes.
Tandis que le démon reste un adversaire qui s’acharne à poursuivre notre perte, Dieu poursuit inlassablement son œuvre de salut et de bonté. Pécheurs accablés par notre misère, tournons-nous vers lui (intr.) ; remettons notre sort entre ses mains, lui-même prendra soin de nous secourir (grad.). Il n’est pas de plus beau commentaire de la sollicitude et de la miséricorde divines envers les hommes, dont la révélation est remplie, que les paraboles de la brebis égarée, de la drachme perdue, qui nous viennent de notre Seigneur lui-même (Év.) »
Dom G. Lefebvre
TEXTES AVEC COMMENTAIRE DE DOM GUÉRANGER
(dans l’Année liturgique – disponible ici avec ses autres livres)
« L’âme fidèle a vu se clore dans la sainte Liturgie la succession des mystères du Sauveur. L’Esprit-Saint est descendu pour la soutenir dans cette autre partie de la carrière, où ne se déroulera plus devant elle que la féconde simplicité de la vie chrétienne. Il l’instruit et la forme sur les données du Maître divin remonté dans les deux. Et d’abord il lui montre à prier. Car la prière, disait le Seigneur, doit être de tous les jours et de tous les instants [1]Luc. XVIII, I. ; et cependant, nous ne savons ni ce qu’il faut demander, ni comment il convient de le faire. Mais Celui-là le sait, qui aide notre faiblesse, et demande en nous et pour nous par des gémissements inénarrables [2]Rom. VIII 26..
Introït (PS 24, 16 et 18) :
Jetez un regard sur moi et ayez pitié de moi, Seigneur, parce que je suis seul et pauvre, voyez mon humiliation et mon labeur et pardonnez-moi tous mes péchés.
(Ps. Ibid, 1-2) Vers vous, Seigneur, j’ai élevé mon âme, ô mon Dieu, en vous je me confie, je ne serai pas confondu.
La prière donc, appuyée sur l’humble repentir des fautes passées et la confiance dans les miséricordes infinies, respire dans l’Introït et toute cette Messe du IIIe Dimanche après la Pentecôte, le premier qui se présente à nous en dehors des fêtes et dans toute la simplicité de l’Office du Temps.
Collecte :
Dieu, protecteur de ceux qui espèrent en vous, et sans lequel il n’y a rien de ferme, ni de saint : multipliez sur nous vos miséricordes ; afin que, sous votre loi et votre conduite, nous passions de telle sorte par les biens temporels, que nous ne perdions pas les éternels.
ÉPÎTRE.
Lecture de l’Épître de Saint Pierre Apôtre (1 Pierre 5, 6-11) :
Mes bien-aimés : Humiliez-vous donc sous la puissante main de Dieu, afin qu’il vous élève au temps de sa visite ; vous déchargeant sur lui de tous vos soucis, car c’est lui qui prend soin de vous. Soyez sobres et veillez ; car votre adversaire, le diable, comme un lion rugissant, rôde, cherchant qui il pourra dévorer. Résistez-lui, demeurant fermes dans la foi, sachant que vos frères qui sont dans le monde souffrent les mêmes afflictions que vous. Le Dieu de toute grâce, qui nous a appelés dans le Christ Jésus à son éternelle gloire, lui-même vous perfectionnera, vous affermira et vous fortifiera, après que vous aurez un peu souffert. A lui soient la gloire et l’empire dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Les misères de cette vie sont l’épreuve que Dieu fait subir à ses soldats, pour les juger et les classer dans l’autre selon leur valeur. Aussi tous, en ce monde, ont leur part de souffrances. Le concours est ouvert, le combat engagé ; l’Arbitre des jeux regarde et compare : bientôt il prononcera sur les mérites divers des combattants, et les appellera du labeur de l’arène au repos du trône où il siège lui-même. Heureux alors ceux qui, reconnaissant la main de Dieu dans l’épreuve, se seront abaissés sous cette main puissante avec amour et confiance ! Contre ces âmes fortes dans la foi, le lion rugissant n’aura pu prévaloir. Sobres et vigilantes dans cette carrière de leur pèlerinage, sans se poser en victimes, sachant bien que tout souffre ici-bas, elles auront uni joyeusement leurs souffrances à celles du Christ, et elles tressailliront dans la manifestation éternelle de sa gloire qui sera aussi leur partage pour les siècles sans fin.
Graduel (Ps 54, 23, 17 et 19) :
Jetez vos préoccupations dans le sein du Seigneur, et lui-même vous nourrira.
V/. Tandis que je criais vers le Seigneur, il a exaucé ma prière pour me délivrer de ceux qui m’attaquent.
Alléluia, alleluia. V/. Dieu est un juge juste, fort et patient, est-ce qu’il s’irritera tous les jours ? Alléluia.
Le Graduel continue d’exciter la confiance de l’âme fidèle. Qu’elle jette tout souci dans le sein du Seigneur : ne l’a-t-il pas toujours exaucée dans ses besoins pressants ? Il la vengera, au jour marqué, de tous ses ennemis.
ÉVANGILE.
Suite du Saint Évangile selon saint Luc (Luc 15, 1-10) :
Cette parabole de la brebis rapportée au bercail sur les épaules du Pasteur était chère aux premiers chrétiens ; on la rencontre partout dans les monuments figures des premiers siècles. En même temps qu’elle continue d’affermir notre confiance dans la miséricorde infinie, elle nous rappelle ineffablement le Seigneur Jésus qui naguère rentrait triomphalement dans les cieux, portant avec lui l’humanité perdue et reconquise. « Car quel est ce Pasteur de notre parabole, s’écrie saint Ambroise, sinon le Christ qui te porte en son corps et a pris sur lui tes péchés ? Cette brebis est une par le genre, non par le nombre. Riche Pasteur, dont nous tous formons la centième partie du troupeau ! Car il a les Anges, il a les Archanges, les Dominations, les Puissances, les Trônes, et le reste, innombrables troupeaux qu’il a laissés sur les montagnes, pour courir après la brebis perdue » [3]Ambr. in Luc. VII..
Mais c’est à saint Grégoire que l’Église demandait aujourd’hui, dans l’Office de la nuit, le commentaire de l’Évangile ; la suite de l’Homélie qu’elle lui emprunte complète l’enseignement, par l’explication de la parabole de la femme et des dix drachmes.
« Celui qui est signifié par le Pasteur », dit saint Grégoire le Grand, « l’est aussi par la femme. Car il est Dieu, et il est la Sagesse de Dieu. Et parce que l’image du prince est requise sur la drachme, la femme (mulier) [4]C’est aussi l’interprétation du Vénérable Bèdc et de saint Cyrille d’Alexandrie sur ce passage de saint Luc : mulier, Sapientia. Saint Augustin s’exprime de même dans ses Enarrations sur les Psaumes : voir au verset 24 du Ps. CIII, Omnia in Sapientia fecisti ; de même, Ps. CXXXVIII, II : « Sapientia Dei perdiderat drachmam… Et quid fecit mulier sapiens ? Accendit lucernam. Et nox illuminatio in deliciis meis. Deliciae nostrae Christus ». Avant eux tous, saint Méliton, au mot mulier. a perdu sa drachme, lorsque l’homme, créé à l’image de Dieu, s’est éloigné par le péché de la ressemblance de son Créateur. Mais la femme allume sa lampe, la divine Sagesse apparaît dans l’humanité. Lampe en effet dit lumière dans un vase d’argile ; et la lumière dans l’argile, c’est la divinité dans la chair. De cette argile de son corps, la Sagesse dit elle-même : Ma force a séché comme l’argile [5]Psalm. XXI, 16.. Car de même que l’argile durcit au feu, sa force a séché comme l’argile, parce qu’elle a affermi pour la gloire de la résurrection, dans le creuset des souffrances, la chair qu’elle avait prise. Ayant donc retrouvé la drachme perdue, elle convoque ses amies et ses voisines, disant : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la drachme que j’avais perdue. Quelles sont ces amies sinon les célestes Puissances, d’autant plus voisines de la Sagesse éternelle, qu’elles s’en approchent dans la gloire d’une vision sans fin ? Mais nous ne devons pas négliger de rechercher pourquoi cette femme, qui figure l’éternelle Sagesse, a dix drachmes, dont elle retrouve l’une, après l’avoir perdue. Il faut donc savoir que le Seigneur a créé, pour le connaître éternellement, la nature des anges et des hommes, et qu’il a fait cette double nature à son image. La femme en conséquence eut dix drachmes ; car neuf est le chiffre des chœurs des anges, et l’homme fut créé dixième pour parfaire le nombre des élus ; séparé de son Créateur, il ne fut point perdu sans retour, parce que la divine Sagesse, revêtant chair, fit briller à ses yeux sa douce lumière à travers l’argile » [6]Greg. Hom. XXXIV in Evangelia..
Offertoire (Ps. 9, 11-12 et 13) :
C’est en vous que se confient tous ceux qui ont connu votre nom, Seigneur, car vous n’abandonnez point ceux qui vous cherchent. Chantez le Seigneur qui habite en Sion, car il n’a pas oublié la prière des pauvres.
L’Offertoire est un épanchement de reconnaissance et d’amour pour le Dieu qui habite en Sion : il n’abandonne point ceux qui le cherchent, il n’a point oublié la prière du pauvre.
Secrète :
Regardez, Seigneur, ces dons de l’Église qui vous supplie, et accordez aux croyants de les recevoir toujours saintement pour leur salut.
Communion (Luc 15, 10) :
Je vous le dis : c’est un sujet de joie parmi les anges de Dieu qu’un pécheur faisant pénitence.
L’Antienne de la Communion rappelle, non sans mystère, le miséricordieux enseignement de l’Évangile du jour, au moment où la Sagesse éternelle rentre pleinement en possession de la drachme perdue, dans le banquet préparé par elle-même au prodigue repentant.
Postcommunion :
Que le sacrement saint reçu par nous, Seigneur, nous vivifie et que nous ayant purifiés de nos fautes, il nous prépare à jouir sans fin de votre miséricorde.
En hommage au Sacré-Cœur de Jésus, dont la fête illumine encore pour ainsi dire le ciel de la sainte Église, nous emprunterons quelques strophes de la Séquence composée en son honneur par le Vénérable Jean Eudes, et revêtue de l’approbation du Saint-Siège pour le Propre de sa Congrégation.
SÉQUENCE. | |
Gaudeamusus exsultantes, Cordis Jesu personantes Divina præconia. |
Publions en des chants d’allégresse les divines louanges du Cœur de Jésus. |
Cor beatum summi Regis, Cor et vitam novæ legis, Omnes linguas concinant. |
Cœur bienheureux du Roi suprême, Cœur et vie de la loi nouvelle, que toute langue le célèbre. |
Cor mirandum Redemptoris Coadunans terram cœlis, Unitatis speculum. |
Cœur admirable du Rédempteur, il réunit la terre aux cieux, miroir d’unité. |
Digna sedes Trinitatis, Plenitudo Deitatis, Amoris miraculum. |
Digne trône de la Trinité, plénitude de divinité, c’est le miracle de l’amour. |
Amoris evangelium, Puri cordis incendium, Magna Dei gloria. |
C’est l’évangile de l’amour, l’embrasement des cœurs purs, pour Dieu sa gloire immense. |
Cœli nectar vivificans, Cordis manna deificans, Amor et lætitia. |
Nectar du ciel qui donne la vie, manne déifiante du cœur, son amour et sa joie. |
Cleri sacri præsidium, Rector benigne cordium, Nostra rege pectora. |
Défense de la tribu sainte, guide bienveillant, guidez nos cœurs. |
Fons æternæ pietatis, Ardens fornax caritatis, Corda flammis devora. |
Source de tendresse éternelle, ardente fournaise de charité, dévorez les cœurs de vos flammes. |
Domus amoris aurea, Turris amantum flammea, Cœtus nostri lex ignea, Fons perennis gratias. |
Vous êtes la maison d’or de l’amour, la tour enflammée de ceux qui aiment, la loi de feu de notre assemblée, le réservoir inépuisable de la grâce. |
Cor, thesaurus sanctitatis, Abyssus humilitatis, Thronus Dei voluntatis, Et centrum clementiæ. |
Cœur, trésor de sainteté, abîme de l’humilité, trône de la volonté de Dieu et centre de sa clémence ! |
Paradisus beatorum, Consolator afflictorum, Pax, et salus peccatorum, Cor omnibus omnia. |
Paradis pour les bienheureux, consolateur des affligés, paix et salut des pécheurs, Cœur qui pour tous êtes toute chose ! |
O Cor ! summa benignitas, Immensa liberalitas, Incomprehensa caritas, Cordis vera felicitas, Cor esto supplicibus. |
O Cœur, bonté souveraine, munificence immense, charité incompréhensible, du cœur vraie félicité, montrez-vous tel à ceux qui prient. |
Fac nos, Jesu, flammescentem Cordis tui caritatem, Et divinam pietatem, Summam quoque sanctitatem Sanctis sequi moribus. |
Faites, ô Jésus, que dans nos mœurs devenues saintes nous imitions de votre Cœur la charité de flamme, la divine piété, la sainteté souveraine. |
O beata Trinitas, Cordis Jesu caritas, Immensæ clementiæ Immensæ sint gratiæ, Immensa sit gloria, Amen dicant omnia. . Amen. Alleluia. |
Bienheureuse Trinité, du Cœur de Jésus l’amour, qu’à l’immensité de votre clémence soient rendues grâces immenses, qu’immense aussi soit votre gloire, que toute créature dise Amen à nos vœux ! Amen. Alleluia. |
»
Notes
1. | ↑ | Luc. XVIII, I. |
2. | ↑ | Rom. VIII 26. |
3. | ↑ | Ambr. in Luc. VII. |
4. | ↑ | C’est aussi l’interprétation du Vénérable Bèdc et de saint Cyrille d’Alexandrie sur ce passage de saint Luc : mulier, Sapientia. Saint Augustin s’exprime de même dans ses Enarrations sur les Psaumes : voir au verset 24 du Ps. CIII, Omnia in Sapientia fecisti ; de même, Ps. CXXXVIII, II : « Sapientia Dei perdiderat drachmam… Et quid fecit mulier sapiens ? Accendit lucernam. Et nox illuminatio in deliciis meis. Deliciae nostrae Christus ». Avant eux tous, saint Méliton, au mot mulier. |
5. | ↑ | Psalm. XXI, 16. |
6. | ↑ | Greg. Hom. XXXIV in Evangelia. |
Merci encore à l’administrateur de nous permettre de préparer la veille, la messe du lendemain… C’est vraiment très appréciable…
Soyez en infiniment remercié…