« Il est vrai que le propriétaire est un présumé nanti. Je parle du propriétaire foncier, pas celui d’actions ou d’œuvres d’art.
Selon l’INSEE, en 2021, 57,5 % des ménages étaient propriétaires de leur logement principal. L’INSEE ne précise pas la proportion de ceux qui « payent un loyer » à leur banque, sous la forme d’un remboursement de crédit, intérêts et principal. Le propriétaire foncier, un nanti qui ne semble pas avoir la cote en Macronie.
N’oublions pas que c’est Emmanuel Macron qui a supprimé l’impôt sur la fortune, sauf sur l’immobilier.
Certes, peu de Français acquittent cet IFI : en 2021, 153.000 foyers ont reçu un avis d’imposition sur la fortune immobilière, soit 0,37 % des foyers imposables dans notre pays. C’est peu, vous me direz, mais cet IFI symbolise la philosophie politique de la Macronie en matière patrimoniale.
C’est, du reste, celle de l’Union européenne : personnes, marchandises, capitaux doivent pouvoir circuler en toute liberté.
Le bien immobilier, par définition, ne circule pas. Ce qu’ont bien compris, d’ailleurs, certains étrangers richissimes qui achètent châteaux, hôtels particuliers ou terres agricoles par milliers d’hectares. Mais ça, c’est une autre histoire…
Donc, les propriétaires fonciers paieront. Il ne fallait pas être grand clerc pour deviner qu’avec la suppression progressive de la taxe d’habitation, grand coup de démagogie politique de la campagne de Macron en 2017, il faudrait bien trouver l’argent ailleurs pour que les communes puissent continuer à fonctionner et investir, bref, rendre ce service de proximité aux Français. Certes, grosso modo, l’État compense la perte de la taxe d’habitation par le biais d’un système complexe qui fait des « gagnants » et des « perdants » et par le transfert de la part de l’impôt foncier qui revenait naguère aux départements. In fine, l’argent ne tombe pas du ciel mais de la poche du contribuable et… des marchés financiers auprès desquels l’État emprunte pour boucler son budget.
Un mot, au passage, sur les conséquences délétères de cette suppression de la taxe d’habitation, au-delà du strict aspect financier. En rompant le lien fiscal entre les habitants et le fonctionnement d’une commune, Macron a porté un coup mortel à la démocratie municipale et, pour tout dire, à la démocratie tout court, la commune étant le cœur battant de notre démocratie représentative. J’habite, je vis dans une commune, alors, je contribue, dans la mesure de mes moyens, à son fonctionnement ; je ne suis pas un client mais un citoyen au sens le plus noble du terme. Avant la Révolution, on payait des droits de bourgeoisie ! Et puis, qu’en est-il du principe constitutionnel de libre administration et d’autonomie fiscale des collectivités territoriales ? En supprimant la taxe d’habitation, Macron a fait plaisir à tout le monde mais a tué la citoyenneté municipale. Fallait-il attendre autre chose d’un mondialiste ?
Mais revenons à la taxe foncière. La loi de finances pour 2023 a été votée dans les conditions que l’on sait. Et cette loi prévoit une hausse des bases locatives cadastrales de 7 % pour tenir compte de l’inflation. En 2022, la hausse avait déjà été de 3,4 %. En deux ans, la hausse dépasse donc 10 %. Une hausse sans précédent. Mais « en bas, à droite » de la feuille de l’impôt foncier, cette hausse pourra être (bien) supérieure… ou (un peu) inférieure. En effet, les communes ont la possibilité de voter, avant le 15 avril 2023, la baisse ou la hausse du taux communal. Le rapporteur général du budget, le macroniste Jean-René Cazeneuve, s’est justifié auprès des Échos en jouant les Ponce Pilate : « Nous pensons qu’il vaut mieux laisser la main aux élus ; ils gardent la possibilité de limiter la hausse à 3,5 %, mais c’est leur responsabilité. » Bah voyons… Le député LR des Côtes-d’Armor Marc Le Fur a bien résumé la situation : « Nos concitoyens sont en train de comprendre une chose : on leur a vendu la disparition de la taxe d’habitation et, en contrepartie, on augmente le foncier. » Dans le monde liquide d’Emmanuel Macron, le propriétaire, d’un pavillon de banlieue comme d’un château, a du souci à se faire. »
de Georges Michel
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