Voici une analyse signée Jean-Pierre Maugendre, président de l’association « Renaissance catholique », qui pose des questions intéressantes et nourrit – que l’on soit d’accord ou pas avec les différents développements proposés – un utile débat.
« Au cœur du psychodrame Le Pen : le programme du Front national
Introduction
Le Front national a pendant des années porté les espoirs politiques et électoraux de nombreux catholiques attachés à la défense de la loi naturelle et de la doctrine sociale de l’Église. Aujourd’hui ce public assiste, atterré, aux échanges verbaux violents, par médias interposés entre Jean-Marie et Marine Le Pen. Dans son récent entretien à l’hebdomadaire Rivarol ce qui était nouveau dans le discours de Jean-Marie Le Pen ce n’était pas son appel à la réconciliation entre gaullistes et pétainistes mais la dénonciation ouverte du nouveau programme du Front national.
Au-delà des analyses freudiennes sur le meurtre du père et le fait de savoir qui est le vrai calife au Front national il semble, à cette occasion, utile de s’interroger sur le projet de gouvernement du parti depuis l’élection à la présidence de Marine Le Pen en 2011 et l’accession à la vice-présidence de Florian Philippot en 2012.
Cette étude est également rendue nécessaire par les succès électoraux du Front national et l’ambition de sa présidente de passer d’une fonction tribunitienne à des responsabilités de gouvernement. A plusieurs mois des prochaines échéances électorales notre souhait est de mener un débat de fond.
Méthode
Par delà les déclarations médiatiques la méthode la plus sûre pour connaître le projet politique du Front national est de travailler sur le programme, élaboré à l’occasion de l’élection présidentielle de 2012, tel qu’il est disponible à ce jour sur le site officiel du FN. Il sera également précieux de comparer ce programme à celui qui existait depuis 1993 sous le titre : 300 mesures pour la Renaissance de la France.
Les points positifs
Sans surprise les points positifs majeurs de ce programme ont trait à la volonté de recouvrer une véritable indépendance nationale et de réinstaurer un état fort. Citons quelques mesures de bon sens : sortie du commandement intégré de l’OTAN, caractère crucial d’une puissante flotte de guerre, expulsion de tous les clandestins, remise en cause des accords de Schengen, recentrage de l’État sur ses fonctions régaliennes, suppression de l’AME (Aide Médicale d’État) et du regroupement familial, diminution drastique de l’immigration légale, prédominance de la loi française sur les traités européens, création d’un revenu parental « dès que les finances le permettront » d’un montant égal à 80% du SMIC, baisse à 14 ans de l’âge de l’apprentissage…
La sortie de l’Euro est également une mesure emblématique dont, bien franchement, je ne sais pas si elle est encore possible dans un pays dont l’endettement est égal au PIB annuel alors que la moitié de la capitalisation de la bourse de Paris est détenue par des fonds étrangers.
Enfin chacun se réjouira de l’annonce du refus du mariage homosexuel.
Les propositions surprenantes
De très nombreux observateurs en ont fait la remarque : sous l’influence, semble-t-il, de Florian Philippot, énarque, fils d’enseignants et gaulliste revendiqué le nouveau programme du Front national fait la part belle à l’État.
L’ENM sera supprimée mais pas l’ENA qui accueillera des « fonctionnaires patriotes », les « services publics » seront sanctuarisés, La Poste redeviendra un établissement public de l’État, la distribution de l’eau sera municipalisée.
C’est cependant à propos de l’école que sont observées les propositions les plus surprenantes. « L’école est un service organique de la République » affirme le programme insistant sur la « préparation à la citoyenneté », et l’ « école de la République ». Il n’y a aucune remise en cause du fonctionnement du Ministère de l’Éducation nationale. Il n’est fait aucune mention d’une possible autonomie accordée aux directeurs d’école ni de la cogestion de l’enseignement par le tandem ministère-syndicats. L’enseignement sous contrat, bien qu’il représente 20% des effectifs scolaires, n’est pas cité ni a fortiori l’enseignement hors contrat. La seule mention des parents se trouve dans une injonction les appelant à apprendre le français en rappelant que : « Le parent d’élève n’est pas le client du professeur. » On pourra enfin s’étonner du regret affiché qu’il n’y ait pas plus d’enfants de moins de 3 ans en maternelle !!!
Économiquement ce programme est marqué par une pression fiscale accrue. De nouveaux impôts seront instaurés sur les entreprises délocalisées, un taux d’IS (Impôt sur les Sociétés) unique à 34% sera établi, les « valeurs foncières surannées » seront revues ce qui entraînera mécaniquement une hausse des impôts locaux, la TVA sera majorée pour les produits de luxe, une « surtaxe des superprofits des grands groupes pétroliers et gaziers » sera mise en place, une taxation complémentaire des revenus du capital financera les retraites, etc.
Plus surprenant : « Les prix de certains produits alimentaires de première nécessité (lait, pain, beurre, farine…) feront l’objet d’un encadrement légal » et l’échelle mobile des salaires sera rétablie.
Enfin l’âge légal de la retraite sera ramené à 60 ans, le système de retraite par répartition étant maintenu. Les salaires jusqu’à 1,4 fois le SMIC seront augmentés de 200€.
Un choix de civilisation ?
Alors que nous faisons face, selon Mme Taubira, à un changement de civilisation ce programme donne l’impression nette de passer à côté de ces enjeux. Le terme de « rupture forte » n’est employé qu’à propos de notre politique étrangère.
Dans l’introduction au programme de 1993 du Front national le mot de civilisation était employé onze fois en neuf pages. Cette civilisation, ancrée dans notre tradition, mettait au premier plan la défense de la famille et de la vie, la liberté d’entreprendre et pour les parents d’éduquer leurs enfants selon leurs convictions, une volonté de réduire le rôle d’un État omni présent mais incapable d’assumer ses fonctions régaliennes.
Concrètement la valorisation de la famille et de la vie passait par :
- la création d’un revenu parental égal au SMIC
- la valorisation légale du mariage
- le vote familial, c’est-à-dire qu’à l’occasion des élections, dans une famille le père aurait disposé des voix de ses garçons mineurs et la mère de celle de ses filles également mineures
- le déremboursement de l’avortement
- la facilitation de l’adoption pré natale
- la protection des enfants contre la pornographie
- l’institution du chèque scolaire, permettant à chaque famille de financer la scolarisation de ses enfants dans l’école de son choix
- la suspension des droits de succession dans la famille afin de permettre la transmission des patrimoines
- la suppression progressive de l’IRPP
Aucune de ces mesures, sauf la facilitation de l’adoption prénatale, n’a été retenue dans le nouveau programme. Il s’agit, bien sûr, d’un choix volontaire mené parce que les temps auraient changé. Certes depuis 1993 les temps ont changé. Ce qui n’a pas changé ce sont les attaques constantes contre le modèle familial traditionnel (un père, une mère et leurs enfants communs) dont, semble-t-il, peu de dirigeants du Front national semblent être les adeptes à défaut d’être les théoriciens. Or tout dans la société repose sur la famille : la transmission de la vie qui assure la pérennité de la société, soutient la consommation et finance les retraites, l’éducation qui transmet les valeurs d’une civilisation, réduit les besoins d’aides sociales et de…police, les véritables solidarités qui s’exercent d’abord entre personnes ayant des liens de sang, des valeurs ou des intérêts communs. Sans remise en cause radicale des paradigmes actuels on ne voit pas ce qui justifierait l’affirmation optimiste selon laquelle : « Notre déséquilibre démographique est provisoire. »
En ne prenant pas position sur ces questions de civilisation ce programme semble porteur de deux difficultés. D’abord il réduit la crise que vit notre pays à des notions matérialistes de chômage, de pouvoir d’achat, de niveau de vie ce qui est une erreur. Ensuite il rend peu crédible la cohérence d’un gouvernement partagé entre laïcards frénétiques et catholiques de conviction, militants LGBT et tenants du mariage traditionnel, étatistes et libéraux, etc.
La prospérité et le développement de notre civilisation ont également été bâtis autour de la notion de responsabilité. Comme l’avait déjà dénoncé en 1840 Alexis de Tocqueville dans son célèbre ouvrage : De la démocratie en Amérique la société moderne se caractérise par un totalitarisme mou dans lequel chacun a abdiqué à l’État sa part de liberté contre la protection que lui assure « le plus froid des monstres froids. » Force est bien de constater que dans notre pays : les prélèvements obligatoires ont atteint un niveau confiscatoire, la multiplication des contraintes légales et réglementaires étouffe toute initiative, la prolifération des organes dits représentatifs ou consultatifs pèse d’un poids sans cesse croissant sur les forces productives.
Les chefs d’entreprise auraient sans doute apprécié de trouver dans ce programme, au-delà de l’annonce d’une Grande Réforme de la Simplification que l’on aurait souhaitée plus concrète, des propositions sur : la simplification du mille feuille syndical qui multiplie le nombre d’élus dans des instances aux responsabilités redondantes et donc les réunions plus ou moins utiles(CE , DP, DS, CHSCT), le financement des syndicats et la gestion des heures de délégation, la vérité du bulletin de salaire, la remise en cause des 35h, l’assouplissement du contrat de travail, la refonte du code du travail et ses 10 628 articles…
Dans un souci de justice on regrettera que n’aient pas été abordés quelques « irritants sociaux » particulièrement emblématiques comme les conditions de retraites des fonctionnaires par rapport à celles des salariés du privé sans oublier les bénéficiaires des régimes spéciaux (SNCF, EDF, etc.), les conditions de paiement de l’État envers ses fournisseurs, le retour à une politique effectivement familiale, et non purement sociale, des diverses allocations dites, à tort familiales, car étant de plus en plus sous conditions de ressources. On peut également s’interroger sur la pérennité de notre système de protection sociale dans lequel solidarité rime plus avec assistanat qu’avec responsabilité.
Nous n’avons pas la naïveté de croire que toute la justice serait possible tout de suite. Ce serait oublier l’inévitable imbrication du bien et du mal dans toute société humaine et le pitoyable état de la société française. Il ne faut pas que le remède tue le malade certes mais il ne faut pas non plus cacher au malade que, eu égard à son état, sa guérison nécessitera de sérieux efforts voire quelques sacrifices. Ce programme promet une guérison sans effort car qui peut espérer être élu sur une perspective de sang et de larmes ? Ainsi un sujet de fond n’est pas évoqué, celui de l’avenir des millions de personnes qui de RMI en RSA ont été installées dans l’assistanat. Comment leur rendre leur dignité, les mettre au travail et les sortir de leur logique d’assistés ?
Analyse
A la lecture de ce programme il apparaît clairement qu’il n’est pas un programme de rupture avec la situation présente. Deux bouc-émissaires sont présentés comme responsables de quasiment tous nos maux :
- l’immigration
- le grand patronat et les multi nationales du CAC 40, « ivres d’expansion mondiale ». La finance qu’il s’agit de « mettre au pas ».
René Girard a magistralement démontré que la théorie du bouc émissaire permet à une société de s’exonérer de ses propres fautes et de masquer ses échecs. Hier c’était le Juif, les 200 familles ou les congrégations, aujourd’hui c’est l’immigré et la finance internationale. Interrogé sur les moyens de financer le retour à la retraite à 60 ans, la Sécurité Sociale, les retraites des fonctionnaires, les services publics… Louis Alliot vice-président du Front national répondait le 12 décembre 2014 dans un entretien aux Quatre vérités Hebdo : « Nous pensons qu’il existe d’énormes sources d’économie (coût de l’immigration, de l’Union européenne, de la fraude…) et qu’il n’est pas nécessaire d’abaisser le niveau de protection sociale dans notre pays. » Le fait est qu’il n’y a plus un seul pays d’Europe occidentale dont l’âge de la retraite ne soit pas déjà effectif ou programmé à 65 ans. Par quel miracle échapperions-nous au lot commun ?
Les raisons avancées de la dette publique laissent de même pantois :
- « forte baisse des recettes fiscales avec les cadeaux fiscaux successifs aux entreprises et aux contribuables les plus riches
- interdiction de financer les déficits par la banque centrale
- variation des taux d’intérêt »
S’il est prévu de financer l’augmentation de salaire de 200€ des bas salaires par une taxe de douane sur les produits importés rien ne semble prévu pour le financement, de l’inéluctable augmentation des salaires, au-dessus de ces salaires les plus bas. Qui croira que le petit chef payé 150 € de plus que son collaborateur va accepter de voir celui-ci devenir plus payé que lui ?
Le modèle jacobin est omniprésent. Il est sans cesse question de l’Etat, « fort » et « stratège ». Les récents déboires d’Areva devraient, peut-être, incliner à plus de modestie sur les vertus de l’État stratège cela d’autant plus que peu de dirigeants du Front national semblent pouvoir s’enorgueillir de succès entrepreneuriaux hors du commun.
Concernant l’école il s’agit de se réapproprier « la culture des hussards noirs de la République ». Le programme de 1993 affirmait au contraire : « Nous entendons rendre aux citoyens et d’abord aux familles le droit de choisir l’école qu’ils veulent. Ils sont maîtres de l’éducation et de l’enseignement de leurs enfants. »
Pas une seule fois le mot de subsidiarité n’est employé. Bien au contraire il s’agit de « détruire les féodalités », transférer à l’État les transports régionaux et l’action économique, nationaliser les banques en difficulté, « mieux contrôler » l’enseignement supérieur…
L’individu se retrouve seul face à l’État : « La République ne reconnaît aucune communauté. » Les « valeurs républicaines » sont un leitmotiv récurrent sans qu’elles ne soient jamais définies
Ce programme se révèle en définitive très… conformiste :
- « le statut de la fonction publique sera préservé » Or ce statut, adopté en 1946 à l’initiative de Maurice Thorez, ministre communiste de la fonction publique, aurait certainement besoin d’une réactualisation car en soixante dix années le monde a sensiblement changé.
- pour lutter contre le terrorisme il s’agira « d’identifier les prédicateurs religieux défendant des thèses politiques extrémistes » S’agit-il des adorateurs de l’oignon ? Personne ne le sait. Ce qui est certain c’est que si le mot islamisme est employé plusieurs fois, le mot islam n’est pas utilisé une seule fois. Mais où est la frontière entre l’Islam et l’islamisme qui en plus peut être radical. Est-ce uniquement le recours au terrorisme ?
- le nombre de familles monoparentales est déploré mais sans chercher à expliquer les raisons de l’ampleur d’un tel phénomène
- la lutte contre les communautarismes est déclarée mais il n’y a rien sur les lobbys, les cercles, les clubs qui dirigent la République.
Les facteurs économiques prédominent systématiquement.
Dans les trois raisons qui imposent de mettre fin à l’immigration les deux premières sont économiques (moyen du patronat pour agir sur les droits sociaux, coût pour la collectivité), seul la troisième observe qu’il s’agit d’une « source de tension dans la République. »
Concernant la famille il est plus souvent question de politique « nataliste » (pour payer les retraites) que de politique « familiale » pour permettre aux parents d’avoir le nombre d’enfants qu’ils souhaitent sans être pénalisés financièrement. « Le pouvoir d’achat constitue la première préoccupation de millions de nos compatriotes. » Est-ce certain ? N’est-ce pas plutôt notre perte d’identité ? Qui aujourd’hui sur la défense du pouvoir d’achat peut rassembler les foules qui défilent contre le mariage pour tous ?
Toutes les hypothèses économiques reposent sur un retour au plein emploi produit par une taxe de douane de 3% sur les produits importés (Contribution Sociale aux Importations).
La cohérence de ce programme semble ainsi mise à mal par la volonté d’éviter de se mettre à dos un certain nombre de groupes de pression ou de communautés dont, au minimum la neutralité, semble indispensable à l’accession au pouvoir par la voie démocratique. Qui pourrait prétendre accéder à la fonction suprême en ayant remis en cause les avantages particuliers (en français privilèges) des fonctionnaires, des bénéficiaires des régimes spéciaux, des syndicalistes, etc. La discrétion sur la présence de 7 millions de musulmans en France est également très symptomatique.
Conclusion
La tonalité générale de ce programme est à mille lieues des 300 mesures pour la renaissance de la France de 1993. Une approche organiciste et incarnée de la société à laissé la place à une conception matérialiste et assistée des relations sociales.
Ce programme ne rompt pas avec la logique de l’État-Providence. Il s’efforce de rassurer les laissés pour compte de la mondialisation en leur faisant croire que la crise que nous vivons est d’abord économique, financière et institutionnelle. Or la crise que nous vivons est surtout morale, intellectuelle, identitaire voire spirituelle. En témoignent la permanence de l’opposition à la loi Taubira et le succès du livre d’Eric Zemmour : Le suicide français. « Faites moi de la bonne politique je vous ferai de bonnes finances » promettait le baron Louis à Charles X.
La Creuse est beaucoup plus pauvre que la Seine-Saint-Denis mais la violence y est moins présente. On peut penser que c’est ce que Patrick Buisson a essayé d’expliquer à Nicolas Sarkozy mais il n’y a pas de Patrick Buisson auprès de Marine Le Pen.
Epilogue : Damnabilis sed non damnandus ?
On prête à Saint Pie X, pressé de condamner l’Action Française la célèbre formule Damnabilis sed non damnandus. Elle est condamnable mais elle ne doit pas être condamnée. Il ne s’agit pas bien sûr, ici, de condamner qui que ce soit mais d’attirer l’attention sur les désillusions à venir. En effet les remèdes à la crise proposés par le FN, d’inspiration nationale-républicaine ne feront, au mieux, que ralentir la chute de notre pays vers le précipice mais ne lui permettront pas de remonter la pente. A ce projet technocratique il manque une vision, un souffle et, très prosaïquement, un préambule qui identifierait les causes réelles de notre décadence et proposerait des voies de renouveau. Or sans vision les peuples meurent. Lors d’un entretien à TV Libertés le 5 Novembre 2014, le directeur du FNJ, Gaëtan Dussausaye, nommé à ce poste de confiance par Marine Le Pen expliquait que ses trois philosophes préférés étaient Aristote, Rousseau, qui libère l’homme de la société et Karl Marx à cause de son point de vue matérialiste sur l’histoire. Tout commentaire semble superflu.
Ce nouveau programme ne saurait donc susciter l’enthousiasme des familles de France, méprisées dans leurs responsabilités éducatives et dont les enfants ne sont considérés que comme futurs contributeurs pour payer les retraites de demain. Or ces familles travailleuses, discrètes, fécondes, dévouées au bien commun sont la colonne vertébrale de notre nation et le vivier dans lequel existent les cadres aptes à diriger un grand pays comme le nôtre. Elles attendent un changement complet de paradigme que le présent programme ne leur propose pas. Notre civilisation est aujourd’hui frappée au cœur. Il ne lui est ici proposé que quelques remèdes antalgiques, certes souvent de bon sens et populaires comme en témoigne la satisfaction des habitants qui ont élu un maire FN au printemps 2014. Cependant ces mesures ne remettent pas en cause les principes individualistes, hédonistes et utilitaristes dont nous voyons les conséquences mortifères se déployer sous nos yeux.
L’enjeu, pour la survie de notre pays, n’est pas de remplacer une classe politique par une autre mais de fédérer une élite de remplacement avant tout soucieuse du bien commun et respectueuse de la loi naturelle. La responsabilité des élites politiques n’est pas d’en appeler sans cesse à la volonté populaire, la démagogie est alors une tentation trop forte, mais d’indiquer les voies d’un authentique renouveau, surtout si elles sont exigeantes. Une société ne peut continuer d’exister que si cette pérennité a du sens pour elle. L’héritier conscient de la valeur de l’héritage qu’il a reçu s’efforce de le transmettre, si possible enrichi, à ses enfants. Il n’est qu’un passeur mais plus l’héritage est précieux plus il est attaché à le transmettre. Coupé de ses racines, né enfant trouvé, on comprend que l’homme moderne ne se sente guère motivé pour transmettre quoi que ce soit si ce qu’il doit transmettre se limite au capital qu’il a lui-même constitué. Ainsi meurent les civilisations. A une France en désarroi, sans repères, il faut proposer un programme qui donne du sens à son existence. Ce projet malheureusement n’en donne pas. Il défend des acquis sociaux dont les bénéficiaires se plaignent, en fait, du nombre croissant d’ayants droits. La France ne fera pas l’économie, pour survivre, d’un changement complet de paradigmes qui sans doute nécessitera un changement de régime. Au-delà des divergences d’analyses politiques et des conflits de génération le cœur de la lutte entre Jean-Marie Le Pen et sa fille est sans doute là : il s’agit d’une différence substantielle de programme politique.
Jean-Pierre Maugendre »