Historien du droit à l’université Paris-II Panthéon-Assas, Jean-Louis Harouel revient pour le Figaro sur le fameux Pacte de Marrakech. Alors qu’on nous annonce qu’il sera non-contraignant et donc « sans danger » pour la France, l’historien rappelle quelques vérités en matière de droit :
Ses recommandations vont constituer un moyen de pression sur les politiques gouvernementales en matière d’immigration. Des militants favorables à la reconnaissance d’un droit à l’immigration vont s’en emparer. Des avocats se réclameront du texte auprès des tribunaux pour obtenir que les prérogatives de l’État en matière de lutte contre l’immigration clandestine soient rognées. En outre, le pacte forme un socle pour l’élaboration ultérieure de normes contraignantes.
Or, implicitement, le document semble fondé sur le principe que, à terme, n’importe qui dans le monde doit pouvoir venir s’établir où il le souhaite. Et, en raison de la croissance démographique de l’Afrique au cours des prochaines décennies, des dizaines voire des centaines de millions de personnes seront désireuses de gagner les pays occidentaux. L’accueil en Europe de masses en quête d’un eldorado serait suicidaire pour les Européens sans même être profitable aux migrants.
Si les partis pris idéologiques de ce document sont si criants, comment expliquer qu’un nombre important de pays occidentaux aient attendu la dernière minute pour annoncer leur intention de ne pas le signer?
Les démocraties occidentales ont fait des droits de l’homme une religion séculière, au sens que Raymond Aron donnait à ce terme: une doctrine qui prend la place des religions et situe ici bas le salut de l’humanité sous la forme d’un ordre à instituer. Il est donc mal vu d’émettre des critiques en matière de droits de l’homme. Prenant enfin conscience du danger, un certain nombre de pays occidentaux – principalement ceux que l’on qualifie dédaigneusement de «populistes» – se sont ressaisis au dernier moment. Ce n’est hélas pas le cas de la France.