Hollande a déclaré ce jeudi qu’il souhaitait que les cantines scolaires et la restauration collective fassent la part belle aux produits issus de l’agriculture française, déplorant qu’à l’heure actuelle seul un tiers de leur approvisionnement vienne de France. La veille au soir, le Conseil départemental de la Mayenne avait annoncé qu’à l’avenir « 100 % des produits servis dans les collèges » seraient d’origine française. Ces engagements sont-ils réellement tenables ? La question se pose car la réglementation des appels d’offres et le droit européen empêchent les cantines de s’enquérir de l’origine des produits.
Aucune mention de l’origine géographique dans les appels d’offres
Pour s’approvisionner, dès que le montant du contrat est supérieur à 15.000 euros H. T., le gestionnaire, qu’il s’agisse d’une collectivité, d’une entreprise ou d’une société de gestion extérieure, doit passer par une procédure d’appel d’offres. Or il est actuellement impossible de mentionner l’origine géographique des produits dans les appels d’offre.
Certes, cette procédure n’est pas obligatoire pour les montants inférieurs à 15.000 euros H.T., et des achats de gré à gré peuvent être réalisés sur simple facture et sans publicité.
La mention de l’origine est contraire aux règles communautaires
Dans la pratique, l’acheteur public réalise des devis avec au moins trois fournisseurs. Pour la gestion concédée à Sodexo, Elior ou encore Eurest (Compass Group), qui représente 40 % de la restauration collective, comme pour la gestion directe, il lui est interdit de faire mention d’une indication géographique pour définir l’origine de son approvisionnement, notamment en viande. « Ce serait contraire aux règles communautaires », explique Dominique-Philippe Bénézet, délégué général du SNRC (syndicat national de la restauration collective).
Même à l’intérieur du territoire français, le code des marchés publics interdit d’introduire des clauses de proximité géographique, dans la mesure où elles dérogeraient au principe de « l’égal accès à la commande publique » et à « l’égalité du traitement des candidats ».
Des stratagèmes pour contourner cette interdiction
Toutefois, ces gestionnaires ont parfois recours à des « stratagèmes », poursuit Dominique-Philippe Bénézet, comme « choisir des races qui ne sont que françaises ou des caractéristiques qui renvoient automatiquement à une origine France ».
Pour encourager l’achat de viande « made in France », les acheteurs peuvent ainsi inclure des clauses de préférence qualitative, comme par exemple de la viande de « Label Rouge ». Une collectivité pourra également formuler des exigences environnementales, en s’appuyant par exemple sur le temps de transport des denrées.
« Si je demande à voir de la viande qui est née, élevée, abattue et transformée dans le même pays, ça limite déjà quelque peu l’offre », explique de son côté Éric Lepêcheur, président de Restau’Co, l’association qui regroupe les acteurs de la restauration collective en gestion directe. « On peut aussi demander à avoir des produits de saison qui proviennent d’un lieu que je puisse faire visiter aux enfants des écoles. C’est à la limite de la légalité, mais c’est possible », affirme-t-il.
Les cantines distribuent chaque année trois milliards de repas par an en France et le secteur éducatif représente 38 % de la restauration collective en gestion directe.