Un rapport sénatorial publié jeudi dernier a mis en cause la gestion gouvernementale de la grippe A/H1N1 en pointant des contrats « déséquilibrés » et rigides avec les groupes pharmaceutiques. Une critique que reprend avec virulence le professeur Bernard Debré, député UMP et farouche opposant à Roselyne Bachelot sur ce dossier.
France Soir : La ministre de la Santé a-t-elle été « à la merci des fournisseurs de vaccins », comme le stipule le rapport sénatorial publié jeudi ?
Bernard Debré : Oui, les laboratoires se sont goinfrés. Ils se sont dit qu’ils allaient profiter de la légèreté de Mme Bachelot, et c’est exactement ce qui s’est passé. Il y a eu des pressions inadmissibles des experts de l’ OMS (l’Organisation mondiale de la santé, elle aussi critiquée par les sénateurs, NDLR), qui sont payés par les laboratoires. Ces 94 millions de doses de vaccin commandées, auxquelles il convient d’ajouter les 30 millions de doses optionnelles, relevaient du délire. Sans compter les masques, le Tamiflu… La ministre s’est précipitée pour signer les contrats, notamment en validant la double vaccination, alors qu’on savait qu’un seul vaccin pouvait suffire.
F.-S. : Pensez-vous qu’elle ait agi par négligence ou cela relevait-il du conflit d’intérêts ?
B. D. : Elle a été négligente. Roselyne Bachelot s’est excitée à l’idée de sauver la France. Rappelez-vous, elle donnait une conférence de presse toutes les semaines l’été dernier ! Et elle dramatisait son discours… Son message aux Français était le suivant : « Dormez, bonnes gens, je suis là pour veiller sur vous ! »
F.-S. : Vous avez toujours tempéré les discours alarmistes sur la grippe A. Vous a-t-elle reçu pour entendre votre point de vue ?
B. D. : Non, jamais. Elle m’a même plutôt renvoyé dans mes buts !
F.-S. : Quels enseignements faut-il en tirer ?
B. D. : Il faut résoudre le problème des experts qui sont à la solde des laboratoires : ils doivent s’engager, verbalement ou par écrit, à être indépendants. Cela relève de la ministre de la Santé. Il faut aussi garder la tête froide pour prendre les bonnes décisions. On sait, par exemple, qu’il n’est pas nécessaire de vacciner 100 % de la population, comme c’était prévu dans le cas de la grippe A : il suffisait de limiter la campagne à 30 ou 35 % de la population pour lutter contre une épidémie.
(Merci à Hulk)