Un article de Valeurs Actuelles sur la politique migratoire de l’Australie. Si la situation de la France ne nécessite pas seulement un arrêt de l’invasion mais une inversion des flux migratoires, cet exemple de réussite devrait inspirer nos dirigeants…
En 2013, la droite australienne, une coalition de libéraux et de conservateurs, avait remporté les élections législatives notamment en promettant, durant la campagne, d’« arrêter les bateaux » chargés de réfugiés convoyés à prix d’or, en général depuis le Moyen- Orient, quelquefois via l’Asie du Sud-Est, par des réseaux criminels de passeurs. Alors que le nombre de ces demandeurs d’asile illégaux se chiffrait en dizaines seulement entre 2003 et 2008, il s’établit en milliers à partir de 2010. La plupart d’entre eux viennent d’Irak, d’Iran, du Pakistan, du Bangladesh, de Somalie et sont musulmans. En 2013, ils sont plus de 20 000 à tenter de forcer le passage par la voie maritime au lieu d’emprunter la voie administrative à partir de leur pays de départ ou de transit.
Un tsunami jugé inacceptable par le peuple australien, très attaché au respect des procédures légales en matière d’accueil et d’immigration. Dès son retour au pouvoir, la droite australienne lance donc l’opération Sovereign Borders (“Frontières souveraines”). Sous l’autorité d’un général trois étoiles, le programme repose sur plusieurs principes combinés. Ainsi, tout bateau pénétrant sans autorisation dans les eaux territoriales australiennes est refoulé. Deuxième principe, les demandeurs d’asile à bord sont conduits dans des centres de détention reculés situés, l’un sur une île dans la province de Manus en Papouasie-Nouvelle-Guinée, l’autre dans le microÉtat océanien de Nauru, un rocher infertile situé juste sous la ligne de l’équateur.
Des endroits peu riants où la loi australienne ne s’applique pas. Là-bas, si le droit d’asile du requérant est finalement reconnu fondé, une fois le long examen du dossier achevé, son octroi ne pourra déboucher que sur une installation dans ces pays (financièrement dédommagés par Canberra) à l’attractivité limitée, pas en Australie. Autrement dit, tout demandeur d’asile illégal se voit refuser toute possibilité d’accueil sur l’île-continent, à vie. Troisième principe, les autorités exercent un black-out à l’encontre des médias sur la conduite des opérations maritimes, officiellement afin de ne pas faciliter les menées des passeurs.
Très vite, cette nouvelle politique du ministère de l’Immigration et (désormais) de la Protection des frontières se révèle une réussite. Le choix de la fermeté, la lenteur des procédures de traitement des dossiers et les récits qui filtrent sur la dureté des conditions d’accueil dans les camps papou et nauruan sont suffisamment dissuasifs pour tarir à la source le trafic. Les passeurs renoncent. Les bateaux ont bien été “arrêtés”. Même l’opposition travailliste reconnaît le succès de la nouvelle politique gouvernementale et y souscrit désormais. Seule l’extrême gauche proteste. Face aux associations droit-de- l’hommistes qui dénoncent des violences dans les camps et réclament une plus grande générosité, le ministre Dutton tient pourtant bon. Quitte à apparaître provocateur.
Les médias dénoncent un “Guantánamo du Pacifique”
Quand les médias australiens, qui n’ont pas accès aux camps, rapportent 2 000 cas non vérifiés de violences sexuelles ou de mauvais traitements et dénoncent un “Guantánamo du Pacifique”, il minimise et ne concède que 20 “incidents sérieux”. Les violences contre les enfants ? « Pour la plupart, des corrections parentales. » Les agressions sexuelles ? Souvent « de fausses allégations », car certaines de « ces personnes qui ont payé des trafiquants pour venir dans [leur] pays » sont prêtes à « aller jusqu’à l’automutilation pour se rendre en Australie ». Confronté à un rapport d’Amnesty International, il balaie « des attaques idéologiques ». Même lorsque la Cour suprême de la Papouasie-Nouvelle-Guinée juge contraire à la Constitution l’accueil des demandeurs d’asile à Manus et contraint le gouvernement de Port Moresby à demander la fermeture des installations, Canberra ne plie pas. Au lieu d’accepter sur son sol les 800 hommes, femmes et enfants internés sur place, le Premier ministre australien annonce, en novembre dernier, un accord avec l’administration Obama : ce sont les États- Unis qui les accueilleront.
Dans sa dernière enquête d’opinion sur les questions de sécurité nationale, conduite à l’été 2016, la prestigieuse Australian National University confirme le soutien massif du public. Tout se passe comme si les citoyens avaient établi que la lutte contre l’immigration clandestine et le combat contre le péril du djihad allaient désormais de pair. Ainsi, 80 % des Australiens sondés jugent-ils “nécessaires” les “politiques actuelles de contrôle des frontières afin de se protéger des menaces comme l’extrémisme islamiste et le terrorisme”. Ils sont encore plus nombreux (85 %) à approuver la nouvelle loi, adoptée en 2015, qui permet la déchéance de nationalité des Australiens binationaux impliqués dans des activités terroristes dirigées contre l’Australie. Pas question pour autant de fermer le pays : les Australiens, dans une proportion analogue — huit sur dix —, continuent de penser que l’immigration contribue positivement au développement économique. À condition, comme depuis des décennies, d’être choisie. Pas subie.