Les musulmans de France ont enfin décidé de prendre officiellement la parole pour défendre les Chrétiens d’Orient.
Les fédérations musulmanes ont lancé ce matin, par la voix de Dalil Boubakeur, recteur et président du Conseil Français du Culte Musulman, un appel solennel depuis la Grande Mosquée de Paris.
Une appel dans lequel ils dénoncent « des barbares (qui) sont en train de perpétrer les pires crimes contre l’humanité et menacent les populations mais aussi la stabilité et la paix entre les peuples de toute la région ».
Un peu plus loin, les signataires « tiennent à réaffirmer leur soutien aux frères chrétiens d’Orient, pour la plupart arabes, ainsi que pour toutes les autres minorités de la région, qui sont victimes actuellement d’une grave campagne destructrice menée par ces groupes terroristes menaçant leur existence même » avant de réaffirmer « sans ambiguïté le droit inaliénable de leurs frères chrétiens d’Orient, une des plus anciennes composantes de cette région, à rester et à vivre sur leur terre dans la dignité et la sécurité et pratiquer leur foi en toute liberté, comme cela a toujours été ».
Rien à redire, ou presque.
Cet appel est signé par des musulmans mais pas seulement. Il est aussi signé par des Chrétiens, dont Patrick Karam, président de la coordination « Chrétiens d’Orient en danger ». Il est bon que les responsables religieux puissent tous condamner les exactions abominables de ces islamistes, là n’est pas la question.
Mais on peut souligner que les musulmans n’auront pas été seuls dans cet appel tardif. Tout comme le dialogue interreligieux est souvent l’initiative des Chrétiens, au Moyen-Orient où ils sont minoritaires comme en France où ils ne le sont pas (encore…). Il est impossible de ne pas regretter que ces responsables musulmans n’aient pas lancé cet appel spontanément et depuis des années, alors que souffraient tant d’innocents Chrétiens dans cette région du monde, notamment depuis le début de cette guerre en Syrie dans laquelle se sont jetés tant de djihadistes étrangers.
On peut par ailleurs faire confiance à ces responsables religieux sans être rassurés. L’islam n’a pas de hiérarchie et tout « responsable » peut être largement controversé par ses fidèles… Comment distinguer dès lors entre ces musulmans qui se font appeler « modérés » et ceux dont les discours ne le sont pas. Comment être certain que l’un primera sur l’autre ?
L’amertume est d’autant plus forte que Dalil Boubakeur confie au Figaro, premier journal à relayer cet appel, qu’il s’agit d’un « cri d’appel » contre «une violence absolument intolérable et incompatible avec l’islam » avant d’ajouter que cette dernière a été formellement «condamnée par l’Arabie saoudite et par la Ligue Arabe ».
Comment Dalil Boubakeur peut-il se référer, en voulant défendre les Chrétiens d’Orient, à un pays qui interdit tout signe religieux, dans lequel aucune église ne peut être construite et dans lequel la conversion au christianisme est encore passible de la peine de mort…
Cet appel était attendu et a été salué pour cette raison, mais il faudrait qu’un jour ces responsables musulmans élèvent la voix contre la quasi totalité de ces pays majoritairement musulmans dans lesquels les Chrétiens et autres minorités n’ont le droit de survivre que s’ils se taisent… Et s’ils refusent de le faire, il faudrait qu’ils nous expliquent alors clairement pourquoi…