« Forgé de toutes pièces par les Républicains, le mythe du droit de cuissage, poncif régulièrement invoqué par les pourfendeurs d’un Ancien Régime y trouvant ainsi un moyen aisé de le discréditer, est encore dans toutes les têtes.
Mis en lumière par nombre d’historiens du XVIIIe siècle, le prétendu droit que s’arrogeait le seigneur de passer la première nuit avec la nouvelle mariée, offrit aux Révolutionnaires un argument de poids pour stigmatiser le régime féodal, et fit l’objet d’une virulente polémique au XIXe siècle : d’amalgames en approximations naquit une croyance tenace.
Appelé droit du seigneur, de jambage, de prélibation, de markette ou de culage, le droit de cuissage fut présenté comme ayant existé par certains auteurs du XVIIIe siècle. Voltaire écrivait ainsi qu’au XIIIe siècle, les usages les plus ridicules et les plus barbares étaient alors établis, et que les seigneurs avaient imaginé le droit de cuissage consistant à coucher la première nuit avec les nouvelles mariées leurs vassales roturières…
Le droit de cuissage n’est qu’un mythe, colporté par les philosophes des lumières, puis complaisamment repris par les auteurs républicains du XIX° siècle, à qui nous devons déjà plusieurs fariboles célèbres, telles que « nos ancêtres les Gaulois », « au Moyen Age les gens ne se lavaient pas », etc…
Cette étrange coutume fut dénoncée pour la première fois au cours du XVIIIè siècle par les philosophes des lumières. Voltaire, dans le Dictionnaire philosophique, à l’article « Cuissage ou Cullage », révéla que certains seigneurs du Moyen âge n’auraient pas hésité à avoir des relations sexuelles avec les épouses de leurs sujets. Toutefois, Voltaire indiquait lui même que cette pratique tyrannique ne fut jamais approuvée par la loi…
Ce n’est qu’au cours du XIX° siècle que le droit de cuissage apparut sous un nouveau jour, sous la plume de certains auteurs. Ainsi, ces derniers, sans même se baser sur des sources d’époque, fustigèrent sans retenue cette soi-disant coutume moyenâgeuse. Mais rappelons qu’à cette date, l’objectif de ces auteurs républicains était de « noircir » l’époque médiévale et d’encenser la République, afin que les jeunes générations ne souhaitent pas retrouver une France d’avant la Révolution. »
Pierre Monteil – Les Mensonges de l’Histoire (2012)
Source : Bibliothèque de combat