Un document du renseignement intérieur (DGSI) affirme que différents acteurs infiltrent le mouvement déclenché par la mort du Chinois tué par un policier : réseaux mafieux, agents de Pékin et jeunes révoltés.
Depuis la mort de Shaoyo Liu, ce Chinois de 56 ans tué dimanche par un policier dans le XIXe arrondissement de Paris, les incidents se sont succédé dans la capitale malgré les appels au calme des proches du défunt. La situation devenait suffisamment préoccupante pour que les services de renseignement français se penchent sur ces dérapages.
Des réseaux mafieux à la manoeuvre
Selon nos informations, une note de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) apporte des premiers éléments de réponse. Ce document confidentiel-défense, rédigé mercredi et transmis aux plus hautes autorités de l’Etat, constate notamment que des réseaux mafieux chinois sont à la manœuvre derrière les rassemblements en lien avec le décès de Shaoyo Liu et dans les violences qui les ont émaillés.
Selon cette note, des individus, défavorablement connus des services de police, ont été parfaitement identifiés sur le terrain, tentant de noyauter les rassemblements à l’insu de la famille du quinquagénaire décédé.
Etendre leur emprise sur la communauté
Parmi eux, un « gros poisson » d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) connu dans des affaires de jeux clandestins et de proxénétisme. Ils espèrent ainsi, toujours d’après le document de la DGSI, récupérer « le marché de la sécurité » parmi la communauté chinoise du XIXe arrondissement. En substance, des réseaux mafieux se servent de la mort de Shaoyo Liu comme prétexte pour tenter d’étendre leur emprise sur cette communauté.
La note ultra-confidentielle apporte d’autres informations. Selon la DGSI, ce mouvement de protestation, à la tête duquel on trouverait un proche du Parti communiste chinois et un agent secret — tous deux investis dans la mouvance associative en France —, échappe à leur contrôle. En effet, le mouvement rassemble de nombreux jeunes gens, très revendicatifs, et qui ne veulent entendre parler ni des relais de Pékin ni des bandes mafieuses.
Reprendre en main les jeunes révoltés
Le document lève aussi le voile sur une autre réalité qui se joue dans les coulisses de ce drame. Pékin voit d’un très mauvais œil les manipulations des réseaux mafieux, tout comme le désir d’indépendance des jeunes mobilisés. C’est la raison pour laquelle les autorités chinoises sont rapidement montées au créneau. Elles ont officiellement demandé à la France de faire toute la lumière sur l’affaire de la mort de Shaoyo Liu, tué par un fonctionnaire en état de légitime défense selon la police, victime d’une bavure selon ses proches.
Mais, au-delà des faits et de leurs circonstances, c’est une lutte d’influence qui se joue en sous-main. La note de la DGSI rappelle en substance que Pékin dispose de bons relais dans la communauté chinoise du XIIIe arrondissement parisien où rien de ce qui s’y passe ne lui échappe. En revanche, les Chinois installés dans le XIXe arrondissement de la capitale ou encore à Aubervilliers sont davantage menacés par l’emprise de réseaux mafieux. Et ça, Pékin le redoute.
De nombreuses récupérations
Toujours selon la note de la DGSI, Pékin surjouerait donc l’indignation depuis la mort de Shaoyo Liu et actionnerait ses propres relais afin de coaliser les communautés afin d’éviter de laisser le champ libre aux filières mafieuses et tenter de reprendre en main les jeunes réfractaires du mouvement. Un double enjeu capital pour Pékin.
L’ensemble des éléments relevés dans ce document secret tend à prouver que la mort de Shaoyo Liu fait l’objet de nombreuses récupérations, bien loin du désir de vérité affiché et réclamé par la famille du défunt. Ce jeudi soir, un nouveau rassemblement était organisé place de la République à Paris et un autre à Bastille. A 22 h 30, aucun incident n’avait été signalé.