Article de Bernard Lugan publié dans Valeurs actuelles du 08/09/2011.
Ce lundi 12 septembre, Paul Kagamé, président de la République du Rwanda, devait effectuer une visite officielle en France (lire aussi le Décryptage de Frédéric Pons). Plusieurs fois repoussé, ce voyage destiné à apurer le contentieux entre Paris et Kigali s’inscrit dans une curieuse atmosphère.
Or, la thèse officielle du régime rwandais est que ce furent des Hutus qui assassinèrent leur propre président afin de pouvoir déclencher contre les Tutsis un génocide programmé. La “légitimité” de son régime reposant sur ce mythe, Paul Kagamé répliqua en rompant les relations diplomatiques avec Paris le 25 novembre 2006. Puis il accusa la France de complicité dans le génocide et menaça de lancer à son tour des mandats d’arrêt contre plusieurs dirigeants français dont MM. Balladur, Védrine, Villepin, Léotard, Juppé, ainsi que contre plusieurs hauts gradés de l’armée française.
Au moment où la France s’est engagée dans une croisade démocratique tous azimuts, la visite de Paul Kagamé paraît insolite. En effet :
2. En mars 2008, Mme Carla del Ponte, ancien procureur du TPIR (Tribunal pénal international pour le Rwanda), révéla que le TPIR détenait des preuves permettant d’inculper Paul Kagamé pour “crimes de guerre et génocide” mais que, si aucune procédure n’avait été ouverte contre lui, c’était en raison des fortes pressions exercées par les États-Unis et la Grande-Bretagne.
4. Le 1er octobre 2010, la publication du rapport Mapping rédigé à l’attention du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’Onu mit en évidence l’ampleur des crimes commis en République démocratique du Congo contre les réfugiés hutus et les populations locales par l’armée de Paul Kagamé. Estimant le nombre des victimes à plusieurs centaines de milliers, les auteurs du document parlent de « génocide ».
Le futur hôte de la France a également ordonné la fabrication du rapport Mucyo mettant en cause des dizaines d’hommes politiques et d’officiers français artificiellement accusés de complicité dans le génocide de 1994. Il a, depuis, été amplement démontré qu’il s’agissait d’un montage grossier reposant sur une accumulation de faux témoignages et de faux en écriture. Lui-même mis en cause, M. Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, a, le 4 mai 2010, devant la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, parlé à ce sujet d’un « tissu de mensonges et d’inventions destiné à créer un contre-feu à l’instruction judiciaire menée en France ».
Ces accusations mensongères n’ont pas été retirées par le président Kagamé avant son voyage en France. Apparemment moins sensibles aux exigences de la realpolitik que les dirigeants français, les chefs de gouvernement espagnol et belge José Luis Zapatero et Yves Leterme ont, le premier en juillet 2010, le second en décembre, refusé de rencontrer un président rwandais soupçonné par deux justices européennes indépendantes d’avoir, le 6 avril 1994, fait abattre en vol l’avion transportant deux chefs d’État en exercice, celui du Rwanda et celui du Burundi, et donc d’être, si ces accusations étaient vérifiées, celui qui aurait allumé la mèche génocidaire.
expert devant le TPIR (Tribunal pénal international pour le Rwanda) et directeur de la revue mensuelle par Internet Afrique réelle.
Kagamé? Kwagamé? génocide? encowe un nazi!