« Restaurer l’Autorité » : commentaire de Mgr Williamson

Dathan et Abiron engloutis par la terre (gen. chap XV)

Dans son dernier billet hebdomadaire, l’évêque traditionaliste évoque la crise actuelle de l’Autorité, à la lumière de la Révélation :

« Tout fils, qu’on aime bien, doit être châtié.
Nous qui refusons Dieu méritons la raclée.

Alors que le christianisme avait déjà ensemencé la terre, le païen Jean-Jacques Rousseau (1712–1778) affirmait que l’homme, par nature, était un animal asocial et que la société humaine n’était qu’un phénomène artificiel. À l’inverse, bien que vivant avant l’ère chrétienne, le païen Aristote (384–322), faisait preuve de beaucoup plus de sagesse : il savait que la société est un fait de nature, car l’homme est par nature un animal social.
Il suffit d’observer comment il participe du matin au soir, à toutes sortes de groupes humains, particulièrement à la famille. De plus, chaque homme étant doté du libre arbitre, il importe que toutes les sociétés aient à leur tête une personne investie de l’autorité afin de coordonner les volontés libres qui, livrées à elles-mêmes, sont susceptibles de se disperser en tous sens. C’est pourquoi toute société a besoin d’une autorité, aussi naturelle et nécessaire à l’homme que l’est la société elle-même. Voyez comment le centurion romain reconnaît en Notre Seigneur un homme investi d’une autorité : il part de l’expérience qu’il a de sa propre autorité dans l’armée romaine (Mt VIII, 8–9[1]« Seigneur, répondit le centurion, je ne suis pas digne que vous entriez sous mon toit ; mais dites seulement une parole, et mon serviteur sera guéri.
Car moi qui suis soumis à des supérieurs, j’ai des soldats sous mes ordres, et je dis à l’un : Va, et il va ; et à un autre : Viens, et il vient ; et à mon serviteur : Fais cela, et il le fait. »
).

Aussi l’autorité est-elle pour l’homme aussi naturelle que sa nature sociale. Or, sa nature sociale vient de Dieu ; il est donc clair que toute autorité humaine vient finalement de Dieu (cf. Eph. III, 15). En ces temps qui annoncent la fin du monde, l’humanité tout entière, ou presque, tourne le dos à Dieu ; on comprend dès lors que les hommes se révoltent contre toute autorité. C’est pourquoi toute sorte d’autorité est de plus en plus fragile. À titre d’exemple, n’est-il pas de plus en plus courant aujourd’hui que les femmes se déclarent indépendantes de leur mari et que les enfants dirigent leurs parents ? Dans le vrai sens du terme, ce n’est pas naturel. Mais il n’empêche qu’aujourd’hui c’est monnaie courante. Car la révolte contre l’autorité coule dans nos veines. Alors comment restaurer l’autorité naturelle ? Le livre des Nombres (Ch.16) dans l’Ancien Testament nous donne un exemple classique.

Moïse et son frère Aaron étaient respectivement les chefs politique et religieux du peuple israélite, et avaient pour mission de le faire sortir d’Egypte et de le conduire dans la Terre promise. Tous deux avaient été désignés par Dieu, et le peuple le savait bien. Mais les Israélites étaient un peuple fier à la nuque raide. Dans le désert il advint que Coré, cousin germain d’Aaron, jaloux de ses privilèges, appela à la révolte 250 autres Lévites et deux Rubénites : Dathan et Abiron. Le peuple suivit les agitateurs contre l’autorité de Moïse et d’Aaron. Ces deux chefs firent immédiatement appel au Seigneur, qui leur dit de rassembler le peuple le lendemain devant le Tabernacle. Moïse dit au peuple de s’éloigner des tentes de Dathan et d’Abiron qui se tenaient là avec tout leur clan. C’est alors que la terre s’ouvrit et engloutit ces révoltés directement en enfer. Ensuite des flammes envoyées par Dieu dévorèrent Coré et ses 250 Lévites qui convoitaient le prestige et les privilèges que Dieu n’avait accordés qu’à la famille d’Aaron.

C’est ainsi que Dieu démontra Lui-même à qui Il avait donné autorité sur le peuple. Pour les Israélites il était très important qu’il y eût une autorité dans le désert car, malgré la traversée miraculeuse de la Mer Rouge (Exode XIV), ce peuple regrettait les oignons d’Egypte, et Dathan se plaignait de la dureté du désert (Nb XVI, 13–14). Pourtant, Moïse n’avait rien d’un tyran ; c’était le plus doux des hommes (Nombres. XII, 3). Quant à Aaron, il n’avait fait au peuple aucun mal (Nb. XVI, 11). Si Dieu n’avait pas eu recours à une punition extrême contre les rebelles, on peut se demander si Moïse et Aaron auraient été en mesure de conduire les Israélites en Terre promise. Quoi de moins aurait permis de rétablir leur autorité ? On peut aisément se figurer qu’après ce double châtiment miraculeux, aucun Israélite n’était pressé de désobéir encore à Moïse ou à Aaron !

En 2019, le matérialisme rampant dans le monde entier fait que les hommes qui croient en Dieu sont de moins en moins nombreux ; et moins nombreux encore sont ceux qui Le prennent au sérieux. La science et la technique semblent garantir à tous la bonne vie. Alors, qu’avons-nous encore besoin de Dieu ? Mais sans Lui, tout fondement de l’autorité disparaît. L’autorité dans la société humaine, qu’elle qu’en soit la forme, est prête à fondre comme la guimauve. Spécialement dans l’Église catholique. Pour comble, le néo-modernisme exerce maintenant sur ses victimes une telle emprise qu’il est pratiquement impossible de les convertir, tant elles sont profondément persuadées qu’elles sont encore catholiques. Comment l’Église peut-elle survivre ? Si l’autorité catholique doit être restaurée avant la fin du monde, un autre feu mortel, tombant miraculeusement du Ciel, ne sera-t-il pas nécessaire, comme pour Dathan, Coré et Abiron ? On ne se moque pas de Dieu (Gal. VI, 7).

Kyrie eleison. »

Notes   [ + ]

1. « Seigneur, répondit le centurion, je ne suis pas digne que vous entriez sous mon toit ; mais dites seulement une parole, et mon serviteur sera guéri.
Car moi qui suis soumis à des supérieurs, j’ai des soldats sous mes ordres, et je dis à l’un : Va, et il va ; et à un autre : Viens, et il vient ; et à mon serviteur : Fais cela, et il le fait. »