Chronique stratégique de Jocelyn Beaumont pour l’acropole.info.
Incognito, de quelques battements d’ailes, un ovni est apparu sur la scène internationale. Il s’est invité à la ronde des Grands. Il vient de détrôner Spoutnik au rayon des plus grandes curiosités de l’espace. Il a pour nom « Hollande ». Repéré dans le ciel de Berlin et de Chicago, il semble continuer son vol en direction de Paris. Sans plus attendre, voici la fiche radar, la signature « psychopolitique » de cet objet stratosphérique éminemment énigmatique. Pourquoi n’a-t-il pas été détecté plus tôt ? Fait-il peur ? Où va-t-il se cracher ? Réponses immédiatement.
Un cerveau lent sous le tonnerre de Zeus
Le nouveau pompier de la crise économique, M. Hollande, n’a pas tardé à se ruer vers les flammes au sens littéral du terme, puisque sa tournée éclair à Berlin l’a projeté sous la foudre, l’avion présidentiel devant aussitôt rebrousser chemin.
Clin d’œil amusant venant du ciel et laissant à penser qu’une sorte de malédiction s’est abattue sur le destin de notre imposteur joufflu. Entré sous une pluie battante à l’Elysée, il est immédiatement ressorti sous la foudre ! Difficile de lui prédire un grand avenir… Imposteur, car il était le dernier des présidentiables favoris au sein du parti socialiste. Le moins audible, le moins populaire, le moins crédible, le plus mou : c’était lui. Et il est pourtant président aujourd’hui. M. Hollande, est, si l’on peut dire, l’une des grandes erreurs de l’histoire. Il n’aurait jamais dû accéder à cette fonction. C’est notre nouveau Jean sans Terre. La France l’a élu parce qu’elle était lassée des gesticulations maniaques de Sarkozy, et qu’elle n’a pas trouvé d’autre concurrent pouvant agglutiner un consensus flasque. Cela n’a pas empêché notre heureux élu d’affirmer avec un bel opportunisme, lors de son discours à Tulle, au soir du 6 mai : « j’ai toujours su que je serais un jour président de la république ». Difficile à croire.
Il est probable que le virage à gauche de la France soit atténué par trois facteurs : l’éventuelle cohabitation, la crise de la zone euro, et la faible personnalité du « président ». Que va-t-il se passer, maintenant que nous avons livré la France au petit maire de Tulle, qui n’a jamais eu de responsabilité ministérielle en France comme à l’étranger, et qui a passé la plus grande partie de sa carrière à bêler contre les idées conservatrices, par solidarité de parti plus que par idéal ?
L’amusante trajectoire d’un inconnu sur la scène internationale
Mais ne nous méprenons pas si vite ! Flanby a une grande force, qui a quelque chose d’amusant : on ne sait pas de quel côté de l’assiette il va dégouliner. C’est un imprévisible aux yeux du monde ! Or il n’y a pas plus dangereux aux yeux d’un spéculateur ou d’un stratège qu’un individu imprévisible. Alors que pas un Français sérieux n’aurait parié un kopek sur le pauvre Hollande il y a un an, voilà qu’il parvient à flouer ses partenaires étrangers, en commençant par obtenir des Américains le retrait anticipé des troupes françaises en Afghanistan, lors du sommet de l’Otan à Chicago. Hollande, qui n’avait jamais réussi à obtenir la moindre estime ne serait-ce qu’au sein du PS (le choix de tant de ministres tout aussi inconnus du public en atteste), est comme une bulle captivant les correspondants de la France par son cheminement aléatoire : que fait-il ? Où va-t-il ? De quoi est-il capable ? Chacun se le demande. Autant Sarkozy caricaturait Napoléon en jetant des plans de bataille du haut de ses talonnettes, découvrant assez vite son objectif de coller à l’Amérique, autant Hollande réussit-il assez bien à créer la confusion en récupérant cette moue de Chirac et de Mitterrand qui consistait à endormir l’auditoire par des phrases lentes et des mots sans concept. Il tente de muer sa faiblesse principale en force. Mais combien de temps l’illusion peut-elle durer ? Jusques à quand les noirs oripeaux du sarkozysme, qu’il a soigneusement empruntés, serviront-ils de couverture à son imposture au sommet de la France ? Personne ne remarque là que nous avons à faire à un simple garçon de café, une sorte de Di Caprio en peau de lapin jouant à attrape-moi si tu peux, ou encore à un Arsène Lupin en fin de carrière, singulièrement ventripotent.
‘Flanby’ va-t-il nous réduire en compote ?
Insaisissable comme un savon de Marseille qui vous glisse entre les mains, Hollande le huileux, M. Flanby, la crème des politiciens en rade sur le port du conformisme, a gagné le caramel du chiraquisme : il s’est fait rassembleur d’idées. D’ici et d’ailleurs, selon la célèbre chanson, il engloutit dans son ventre mou toute idée tranchante. Le retrait anticipé des troupes d’Afghanistan, qu’il a fait semblant d’exiger de l’Amérique avec fermeté, est en réalité une idée que le président Obama, en campagne électorale, pouvait difficilement contester, et qui peut même le servir dans la perspective de sa réélection. Interrogé par le magazine Diplomatie (n°55, mars-avril 2012) et la Revue Défense nationale (n°749, avril 2012) dans le cadre d’interviews de campagne, le candidat Hollande s’était attardé sur sa vision stratégique de la France et de sa politique étrangère, avant la surprise du 6 mai. Des pages remplies de vœux pieux et de douces palabres. Mais qui traduisent une profonde méconnaissance des dossiers internationaux, due sans doute au temps passé à cirer le banc des mauvais élèves de l’Assemblée. Turcophilie inopportune, contestation de l’alliance franco-russe, bellicisme anti-syrien, choix de restructurer l’armée malgré plusieurs réformes déjà effectuées, anticolonialisme lycéen, prétention à l’écriture d’une nouvelle stratégie ex nihilo, volonté de regonfler une Europe de la défense bourrée de rustines et crevée jusqu’à la moelle, sont les grandes préoccupations de M. Flop. Rayer la triste politique étrangère du « candidat sortant » est une chose. Ruer dans les éternels brancards idéologiques de la gauche semble totalement incongru. De quelle Europe de la Défense parle notre néophyte ? Avec la crise économique et la quasi-suppression des budgets de défense dans tous les pays européens qui s’en remettent toujours davantage à l’Otan, il ne reste que deux pays capables de financer cette Europe de la défense : la France et la Grande-Bretagne. La marche-arrière du « président » est illusoire car l’Europe de la défense est au point mort. La tentative du « grand saut » européen relève du désespoir. On retiendra de Flanby sa résistance au moule américain.
De poudre et de doré
Tel un joli pétard projeté en l’air, M. Hollande a soudainement brillé de mille éclats. Mais que restera-t-il de son feu d’artifice électoral sinon une simple retombée de poudre ? Déjà sur les dossiers européens, l’idéalisme anachronique des leaders de la gauche se heurte aux aboiements de Mme Merkel et de ses bergers allemands, avides d’austérité. La pensée de M. Hollande n’existe pas, de même qu’elle n’a jamais existé. Le mouvement populaire qui l’a porté au pouvoir, à la fois instinctif et désordonné, a toutes les caractéristiques du boulangisme. Souvenons-nous de Georges Boulanger, cet inconnu, porté d’un seul coup à la Chambre des députés puis au ministère de la Guerre, soutenu par une effervescence populaire invraisemblable. Il faillit s’emparer de la présidence du Conseil mais termina deux ans après dans les oubliettes de l’histoire. Au point qu’il se retira la vie. Celui que Clémenceau nommera le « sous-lieutenant de gendarmerie ». C’était en 1887. Aujourd’hui, il n’y a rien qui puisse promettre davantage de lendemains au hollandisme. Encoconné comme une larve de papillon durant des années au parti socialiste, François Hollande, de ses ailes saupoudrées, a vu un beau jour, quoique pluvieux. Celui de l’investiture. Verra-t-il le crépuscule de son mandat ?
Jocelyn Beaumont, pour l’Acropole.info