Le cardinal Walter Kasper a reçu, lundi 3 mai 2010, le « Prix Isaïe interreligieux » décerné par le Comité juif américain (AJC, American Jewish Committee, Isaiah Interreligious Award). Le président de la Commission pontificale pour les relations religieuses avec le judaïsme s’est vu attribuer cette distinction, au terme de la session annuelle de l’AJC, le 30 avril dernier, en raison de « son long engagement dans le dialogue entre juifs et catholiques » et de son « leadership » dans « le progrès de la compréhension entre ces deux fois ».
Dans un discours prononcé au Centre d’enseignement chrétien-juif à l’université de Boston, le 6 novembre 2002, le cardinal déclarait :
« L’universalité de la rédemption du Christ pour les Juifs et les Gentils est si fondamentale à travers tout le Nouveau Testament qu’elle ne peut pas être délibérément ignorée ou passée sous silence. Cela ne signifie pas que les Juifs doivent devenir chrétiens pour être sauvés ; s’ils suivent leur propre conscience et croient dans les promesses de Dieu comme ils les comprennent dans leur tradition religieuse, ils sont dans la ligne du plan de Dieu, qui pour nous atteint son achèvement historique en Jésus-Christ ».
« La mission comprise comme un appel à la conversion de l’idolâtrie au Dieu vivant et vrai ne s’applique pas, et ne peut pas s’appliquer aux Juifs ».
Conséquence : il n’y a pas « d’activité missionnaire envers les Juifs comme il y en a à l’égard des autres religions non-chrétiennes ».
Avec de tels propos hérétiques, on comprend bien pourquoi les déicides lui ont remis ce prix…
La formulation du cardinal Kasper se ressent quelque peu de notre époque – ce qui la rend peut-être d’autant moins grave, d’une certaine façon. Il y a une tonalité différente, mais une position fondamentalement proche de celle de bien des auteurs médiévaux.
Bernard de Clairvaux, prédicateur de la seconde croisade et pour le moins peu intéressé au dialogue avec les Infidèles et les Païens, fut-il un hérétique ?
J’en doute au moins autant que l’Eglise qui le dit »doctor mellifluus » (aux paroles de miel), voire comme le dernier des Pères. Je me permets donc de la citer:
« Les Juifs ne doivent point être persécutés, ni mis à mort, ni même bannis : consultez les pages de la divine Ecriture… Je connais la prophétie que le psaume renferme et qui les concerne : « ne les tuez pas de peur que mes peuples ne m’oublient ». Ils sont des traits vivants qui nous représentent la passion du Seigneur… Il convient à la piété chrétienne d’épargner les vaincus, ceux qui ont surtout reçu les promesses de la Loi, de qui sont descendus nos pères et au nombre desquels était, selon la chair, le Christ… »
Autrement dit, les Juifs en tant qu’ils demeurent hors de l’Eglise ne sont pas en dehors de l’économie générale du Salut.
Plus encore, leur singularité est un témoignage: on ne saurait l’éliminer sans risque.
Ajoutons que Bernard de Clairvaux, l’une des plus grandes et intransigeantes figures du XIIe siècle, a lui-même reçu l’équivalent « Prix Isaïe interreligieux ». Selon Jeschua Ben Meïr: »ainsi parlait cet homme sage et sa voix était redoutable car il était aimé et respecté de tous. Il n’avait cependant reçu ni argent ni rançon de la part des Juifs, c’était son cœur qui le portait à les aimer et lui suggérait de bonnes paroles pour Israël.
« Autrement dit, les Juifs en tant qu’ils demeurent hors de l’Eglise ne sont pas en dehors de l’économie générale du Salut. »
N’importe quoi mon pauvre Octave !!!
Le fait de dire qu’il ne faut pas persécuter les Juifs (ou tout autre hérétique) ne veut pas dire qu’ils seront sauvés des flammes de l’Enfer pour autant…
J’apprécie les trois points d’exclamation.
Cela étant, être intégré comme communauté à »l’économie générale du Salut » ne signifie que l’on est nécessairement sauvé. Ainsi vous et moi, par exemple.
Le mal y participe d’ailleurs lui-même, sans que les démons puissent pour autant connaître la rédemption: aller au désert, du moins dans la tradition orientale, c’est partir au combat contre eux – ce dans le cadre d’une dynamique de conversion en vue du Salut. La lutte nécessaire est une vieille thématique.
Qui plus est, saint Bernard ne dit pas seulement qu’il ne faut pas persécuter les Juifs, mais qu’ils rendent témoignages de la chair de Dieu. D’une façon plus cynique, rhétorique, ne dit-il pas également qu’il est bon que les Juifs commercent ou trafiquent l’argent à la place des Chrétiens ? On ne doit cependant pas interpréter cette expression dans sa littéralité, puisque Bernard de Clairvaux sait parfaitement qu’il s’adresse à des gens qui, précisément, font ce qu’ils prêtent aux Juifs (technique de critique indirecte qu’il utilise fréquemment dans son œuvre). Quant à la conversion des Juifs, s’il en fait mention, elle concerne la fin des temps et n’est pas pour lui douteuse.
Revenons maintenant sur cette »économie générale du Salut » d’une autre façon. Prenons l’exemple des Infidèles et des Païens: Bernard montre une indifférence absolue à l’égard de la géopolitique, de la culture et de la théologie islamiques, contrairement à son contemporain Pierre le Vénérable, qui fit traduire le Coran en vue d’une apologétique chrétienne. Donc… on a là une position qui a sa singularité. Pour les Païens d’Europe la chose est encore plus claire: là ou saint Bernard insiste avec une grande force s’adressant aux templiers sur le danger de l’homicide, il est pour partie à l’origine de la campagne ultra-violente contre les Wendes.
Cela montre que nous avons d’un côté les Juifs, de l’autre les Païens et les Infidèles. Si ces derniers sont des abstractions, des étrangers absolus, hors de la Chrétienté et du cadre de pensée bernardin… tel n’est pas le cas des Juifs. Ceux-ci sont ici chez eux, d’une façon bien singulière et en raison même de cette singularité.
S’il est nécessaire de donner un autre élément, on précisera en conclusion que l’eschatologie tient une place fondamentale dans la pensée et le projet du saint. Une eschatologie hic et nunc si l’on veut. Le monde comme dynamique à la manière du Cantique des Cantiques. Il n’y a aucune raison de penser qu’il abandonne cela en se penchant sur la question des Juifs: la seule réponse cohérente est qu’ils s’insèrent à leur façon dans ladite dynamique du monde.
Quelle logorrhée imbitable !
Je ne savais pas que la Nouvelle Droite avait une branche judéo-chrétienne…
Pitié Monsieur Octave de Benoist, cessez de nous abreuver de vos fadaises !
Le problème, c’est d’assimiler un effort intellectuel minimal (au résultat valable ou non) à la Nouvelle Droite. Inutile de s’étonner, alors, de l’indigence absolue du nationalisme depuis la fin des années 1930.
Vous affichez une position tranchée, mais refusez de la défendre.
A partir de là ne reste que l’affirmation d’une humeur et le fruit d’une émotivité, ce qui nous conduit assez loin de toute Tradition.
En quelque sorte, vous vous faites le gardien d’un ultra-catholicisme sans catholicisme, où la position d’un saint vaut moins d’être discutée que la vôtre. Ce qui est d’un modernisme effrayant.
@ Octave
« Bernard de Clairvaux, prédicateur de la seconde croisade et pour le moins peu intéressé au dialogue avec les Infidèles et les Païens, fut-il un hérétique ? »
L’Eglise a bien souvent discuté avec les non catholiques, mais dans l’unique objectif de les convertir. En aucun cas pour les conforter dans l’erreur.
« Les Juifs ne doivent point être persécutés, ni mis à mort, ni même bannis : consultez les pages de la divine Ecriture… Je connais la prophétie que le psaume renferme et qui les concerne : « ne les tuez pas de peur que mes peuples ne m’oublient ». Ils sont des traits vivants qui nous représentent la passion du Seigneur… Il convient à la piété chrétienne d’épargner les vaincus, ceux qui ont surtout reçu les promesses de la Loi, de qui sont descendus nos pères et au nombre desquels était, selon la chair, le Christ… »
Il rappelle simplement qu’il faut avoir une attitude charitable envers les juifs. Ne pas les tuer, prier pour eux et ne pas oublier le rôle qu’ils jouent depuis la création du monde jusqu’a sa fin (leur conversion)
« ainsi parlait cet homme sage et sa voix était redoutable car il était aimé et respecté de tous. Il n’avait cependant reçu ni argent ni rançon de la part des Juifs, c’était son cœur qui le portait à les aimer et lui suggérait de bonnes paroles pour Israël. »
Je ne connais pas le contexte de ce passage mais n’oublions pas que le judaisme antiqu, médiéval et contemporain ne sont pas les mêmes religions. A l’époque médiéval le judaisme subit une profonde évolution (Talmud).
Il y a plusieurs vérités à rétablir :
– Pierre le vénérable lorsqu’il eut fini la lecture du coran pensa que l’Islam n’était qu’une vulgaire hérésie du catholicisme.
– L’ensemble des paroles de saint ne sont pas à prendre comme infaillibles, loin de la.
– On ne tire pas de quelques paroles d’un saint une règle sur une période/zone géographique aussi vaste que l’europe (même la France) au Moyen age.
Les paroles (rapportées pour certaines) de bernard de Clairveaux (hors de leur contexte) ne doivent pas nous faire oublier la défiance générale des souverains et de l’Eglise du moyen age vis à vis des juifs.
Quelques sources :
– le concile de Metz de 890 excomunie les chrétiens qui s’assiéraient à la même table que les juifs ou accepteraient d’eux des victuailles,
– Capitulare de 805, 809 (Charlemagne),
– Le concile de Meaux-Paris en 845-846 de Pavie en 850 etc…
– G. DAHAN : « les intellectuels chrétiens et les juifs au moyen age ».
– Arych Graboïs : « une principauté juive dans la france du midi à l’époque carolingienne »
– J. Régné : »Etude sur la condition des juifs de Narbonne du Ve ai XIVe siècle »
Il me semble que votre propos, globalement, n’est pas différent du vôtre, en dépit de ma lecture des positions de saint Bernard. Je ne vois pas de vérités à rétablir, puisque je ne dis pas le contraire concernant Pierre le Vénérable.
Je note seulement deux types d’attitudes intellectuel et si l’on peut dire sociale. De la même façon ce que je souhaite simplement établir, c’est qu’il distingue clairement deux groupes: les Juifs et les autres. Ce en fonction de leur appartenance ou de leur non-appartenance à l’espace et à la logique de la Chrétienté. Il y a clairements deux attitudes, a priori contradictoires chez lui, à moins de postuler une distinction intérieur/extérieur du monde tel qu’il le conçoit.
Concernant l’autorité d’un saint, vous avez raison, c’est par contre un véritable sujet. Je défends ici une certaine position, contre une autre, qui me semble tristement an-historique, d’où la réquisition – quel terme… – d’une grande figure du XIIe siècle. Je ne prétends pas, d’ailleurs, que ceci est un propos définitif, valant définition dogmatique.
De la même façon et dans un esprit polémique, nous ne devrions pas citer de capitulaire sans examen socio-historique. Si la question de l’autorité (dans la perspective d’une utilisation au XXIe siècle) est ce qui nous intéresse, alors il n’est pas évident (je souligne) que X prime Y et inversement.
PS: concernant les propos »hors contexte », je vous prie de croire que je ne cherche pas ici à les tronquer. Eventuellement au congrès, si vous y participez et le souhaitez, nous aurons l’occasion d’en discuter – puisque tout ceci est pour moi sujet d’études.
[Quelques coquilles dans mon message]
(je n ai que très peu de temps a consacrer a internet. Je vais répondre cette semaine. Oui je serais présent au congrès)